PAR MATHIEU DEMILLY Dans l’arrêt Cottrill v. Utopia Day Spas and Salons Ltd, 2017 BCSC 704, la Cour suprême de la Colombie-Britannique a revisité la question du congédiement d’un employé pour incompétence.

Dans cette affaire, l’employée, Mme Cottrill, travaillait dans un spa depuis 2004. À un moment donné, l’employeur s’est déclaré insatisfait de ses performances et a signifié à Mme Cottrill qu’elle devait les améliorer dans les deux (2) à trois (3) mois suivant sous peine d’être congédiée. Toutefois, malgré l’amélioration de ses performances, Mme Cottrill s’est vue congédiée pour incompétence.

Dans son jugement, la Cour a rappelé plusieurs principes importants qui doivent guider les employeurs lorsqu’ils exercent leur prérogative disciplinaire. Le premier principe est la proportionnalité – la sanction choisie par l’employeur face à une méconduite ou un rendement insuffisant d’un employé doit toujours être proportionnelle à la faute ou au manquement.

De plus, lorsque les performances d’un employé sont insuffisantes, la Cour a rappelé que l’employeur doit accorder du temps à l’employé de s’améliorer ainsi que de lui offrir les ressources appropriées pour y parvenir. Les normes de rendement invoquées par l’employeur doivent être claires, raisonnables et intelligibles. L’employeur a également l’obligation d’aviser son employé que s’il n’atteint pas ces objectifs, il pourrait être mis fin à son emploi.

La Cour a continué en disant que le manquement aux normes de performances attendues ne justifiait pas, en soit, le congédiement d’un employé. Ne pas atteindre des objectifs fixés par son employeur ne signifie pas nécessairement que l’employeur peut mettre fin à l’emploi. La Cour exige que ce manquement aux objectifs de performance imposé par l’employeur doit être lié à une forme d’incompétence de l’employé. La Cour prendra en considération tous les facteurs possibles qui pourraient venir expliquer le manque de performance de l’employé (marché, économie, ralentissement, saison etc.).

Dans cette affaire, l’employeur a tenté de justifier le congédiement en se fondant sur les performances passées de Mme Cottrill. La Cour a rejeté cet argument car la preuve ne démontrait pas que l’employeur n’était pas satisfait des performances de l’employé.

La Cour a conclu que la lettre avisant Mme Cottrill de sa période de probation était ambiguë car elle ne précisait pas suffisamment ce qui était attendu en termes d’objectifs. De plus, c’était la première fois que l’employée se voyait confronter aux normes de performance en question, mais encore, c’était aussi la première fois que des problèmes d’attitude et de motivation lui était reprochés. La Cour a rappelé que l’évaluation de la motivation ou de l’attitude d’un employé est de nature subjective – loin des standards objectifs requis en matière de congédiement pour incompétence.

Au final, la Cour a conclu que Mme Cottrill ne s’était pas vue offrir une véritable chance d’améliorer ses performances et donc que le congédiement était abusif (injustifié). L’employeur a été condamné à verser les indemnités de licenciement requises par la loi.

La Cour a aussi envoyé un signal en accordant des dommages-intérêts majorés de l’ordre de 15 000 $. En effet, la Cour a conclu que l’employeur avait manqué à son obligation d’agir de bonne foi à l’égard de Mme Cottrill et avait notamment :

  • congédié l’employée sans lui donner la chance de pouvoir améliorer ses performances ;
  • congédié l’employée selon des normes de performance qu’il n’avait jamais exigé auparavant, et les avait appliquées de manière disproportionnée ;
  • congédié l’employée malgré les améliorations notables des performances ;
  • avancé l’idée que l’employée avait un problème sans aucun fondement factuel ;

Que retenir de cette décision pour les employeurs ?

Il est difficile et périlleux de congédier un employé pour incompétence.

La Cour n’acceptera pas un tel congédiement sans être satisfaite que l’employeur a offert toutes les opportunités raisonnables à l’employé d’atteindre les standards exigés. Ces standards doivent être énoncés clairement, être intelligibles et connus. En outre, ils doivent être raisonnables et appliqués de manière équitable. Un manquement à un objectif de rendement ne constitue pas en soit un motif de congédiement suffisant.

Il est préférable de nous consulter avant de prendre la décision de congédier un employé afin que nous puissions vous conseiller sur vos obligations.

Que retenir de cette décision pour les employés ?

Si on met de côté toutes les erreurs de l’employeur quant au congédiement de Mme Cottrill, ce qui a fait pencher la balance en faveur de l’employée est qu’elle a amélioré de façon notable ses performances.

Ainsi, si vous êtes placé sous probation, il est important d’agir vite pour (1) comprendre ce qui est attendu de vous, mais aussi (2) de voir comment vous pouvez améliorer vos performances. Si vous êtes en mesure d’augmenter votre rendement, vous aurez fait un grand pas dans la préservation de votre emploi ou de vos intérêts.

Si vous sentez que vous en mis en situation d’échec ou que les objectifs qu’on vous assigne sont déraisonnables, consultez-nous pour obtenir nos conseils.

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